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On ne verra plus à Estagel la silhouette familière, un peu voutée, le pas rapide pour traverser la rue toute emmitouflée en hiver, ni le sourire accueillant, amusé, parfois narquois mais jamais dédaigneux, de Roger Payrot qui savait si bien du geste transformer une terrasse de café en jardin la place en Arago en Agora. L'enchanteur est parti rejoindre Sophocle, Shakespeare, Molière, Caravage, Stendal, le petit Marcel, et tant d'autres nous laissant seuls avec notre peine. Né à Ille en 1944, mais familier des montagnes du Vallespir du coté maternel, il était arrivé au collège d'Estagel au début des années soixante pour repartir aussitôt enseigner l'anglais en Andorre puis revenir à son premier poste à la fin des années1960.
Enthousiasma de nombreuses générations de collégiens et collégiennes, en leur faisant pratiquer le théâtre à partir du répertoire qu'il accommodait à sa sauce, suscitant des vocations, donnant à tous un accès à la culture qui n'avait rien d'un vernis, créant de toutes pièces, sur un an ou deux, d'éphémères troupes dont bien des professionnels eussent pu envier le dynamisme et l'a propos.
Professeur, il fut aussi comédien, metteur en scène, dramaturge, travailla pour des compagnies du pays, fédéra dans la « Genèse » une troupe adolescente et adulte, et fut même expert de la DRAC, rien de ce qui touchait le théâtre ne lui était étranger et nul plus que lui ne courut les spectacles d'Epidaure à Vérone en passant par Paris.
Dans la salle des profs du collège il fit deux rencontres qui devaient l'attacher définitivement à Estagel, un enseignant de maths, André Valls, et un prof d'histoire, Antoine Sarda, fervent littéraire et mélomane, qui devint conseiller général du Canton de La-Tour-de-France de 1973 à 2008 et maire d'Estagel de 1976 à 2001.
Les deux passionnés de culture, entreprirent en 1983 de créer un festival axé sur le théâtre et l'opéra, l'opération, la greffe diront certains, réussit et ce moment autour de la chapelle Saint Vincent fut pour Roger Payrot, devenu président du festival, l'occasion de donner toute la mesure de son talent.
Le festival disparut à l'occasion d'un changement de municipalité mais ressuscita sous le nom de Jours du théâtre en 2008 lors d'un nouveau changement. Roger Payrot retrouva sa présidence et, entouré d'une équipe convaincue, lui donna une inflexion nouvelle, mais toujours tournée vers l'excellence. Cet investissement dans la cité, il était aussi le président de l'Office estagellois de la culture, ne rendent pas compte à eux seuls de l'homme, qui avait conservés avec ses anciens comédiens et comédiennes devenus grands et grandes, des liens nombreux et était pour nombre d'entre eux un maitre. Dramaturge d'importance, il refusa toujours de se faire éditer au prétexte qu'il y avait déjà trop de livres, que pourtant il dévorait de façon aussi compulsive qu'il fumait. Surtout, il était un prodigieux analyste de la littérature dont il avait une connaissance encyclopédique mais jamais pédante. Cet amoureux de la Méditerranée, d'abord de la Grèce et de l'Italie, mais ni la péninsule ibérique, les Balkans, la Turquie, l'Egypte n'avaient échappé a' ses visites, n'avait de cesse d'y revenir, le COVID et la maladie l'empêchèrent d'en arpenter les rives mais il savait suppléer par le rêve le voyage. Estagel aimait-il à dire est un morceau de Grèce ,cependant renoncer à y voir l'essence du pays catalan. A tous ici, la gentillesse, la simplicité prsité et la culture aimable de Roger vont manquer durablement. Michel Cadet
 

 

 
 
 

 

 
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